Dérassi est bien plus qu’un simple nom sur la carte du Bénin. Située dans le département du Borgou, cette localité rurale au nord-est du pays incarne à la fois les défis du développement territorial et le potentiel socio-économique d’une région encore trop souvent marginalisée. Avec une population de près de 20 000 habitants recensée en 2013, Dérassi constitue un pôle d’équilibre essentiel pour la commune de Kalalé et ses environs.
Une position géographique stratégique
Localisée à environ 10°09′45″ de latitude nord et 3°15′44″ de longitude est, Dérassi bénéficie d’un emplacement charnière entre plusieurs sous-zones rurales du Borgou. Elle fait partie des arrondissements de la commune de Kalalé, non loin de la frontière avec le Nigeria. Ce positionnement transfrontalier favorise les échanges commerciaux, en particulier agricoles, avec les régions voisines du Nigéria. Dérassi est ainsi un point d’ancrage pour de nombreux itinéraires de transhumance et de transport de marchandises dans la région.
Organisation administrative et composition territoriale
Dérassi est un arrondissement administratif du Bénin, rattaché à la commune de Kalalé. Il regroupe plusieurs quartiers ou villages, dont certains ont acquis une notoriété locale : Alafiarou-Dérassi, Gannourè-Hèrè, Guiri-Gando, Kakatinnin ou encore Mareguinta. Cette subdivision administrative reflète une organisation territoriale héritée des réformes de décentralisation engagées au Bénin dans les années 2000. Chaque quartier conserve ses spécificités culturelles et sociales, tout en étant intégré à une structure administrative plus large, pilotée par une mairie décentralisée et représentée localement par un chef d’arrondissement.
Une population jeune, rurale et résiliente
Avec près de 20 000 habitants lors du recensement de 2013 (source : Institut National de la Statistique et de l’Analyse Économique du Bénin), Dérassi présente un profil démographique typique du nord du pays : une population majoritairement jeune, rurale et issue de communautés sociolinguistiques variées. Les groupes peuls et baribas y sont particulièrement présents, vivant souvent de l’élevage, de l’agriculture vivrière et de petits commerces. Malgré l’éloignement des grands centres urbains, les habitants de Dérassi démontrent une forte résilience face aux défis structurels, notamment en matière d’éducation, de santé et d’accès aux services de base.
Activités économiques : l’agriculture comme pilier central
L’économie de Dérassi repose principalement sur une agriculture de subsistance et de semi-commercialisation. Les cultures dominantes sont le maïs, le mil, le sorgho, le niébé et l’arachide. L’élevage transhumant — notamment bovin — joue également un rôle vital dans la subsistance des ménages et dans les circuits d’échange avec les marchés régionaux. Bien que l’économie locale demeure informelle, elle est structurée autour de marchés hebdomadaires, lieux cruciaux d’interactions sociales et économiques. De plus, certaines initiatives de développement rural, souvent appuyées par des ONG ou des partenaires internationaux, tentent de moderniser les pratiques agricoles tout en soutenant la formation des jeunes aux métiers agricoles.
Défis structurels : entre enclavement et ambitions de développement
Comme de nombreuses localités rurales du nord béninois, Dérassi fait face à d’importants défis : enclavement routier, infrastructures déficientes, accès limité à l’eau potable et à l’électricité, faible couverture sanitaire. Les routes reliant Dérassi aux communes voisines sont souvent impraticables en saison des pluies, ce qui entrave les transports et accentue l’isolement. Toutefois, plusieurs plans communaux de développement (PCD) identifient Dérassi comme une zone prioritaire, en raison de son potentiel agro-pastoral et de sa dynamique démographique. Des projets visant l’amélioration de l’accès à l’éducation, à la santé et à l’hydraulique villageoise y sont en cours de déploiement, avec l’appui de l’État béninois et de partenaires au développement comme la GIZ ou l’Union européenne.
Culture locale et cohésion sociale
Dérassi se distingue également par la richesse de ses traditions culturelles. Entre fêtes de la moisson, cérémonies initiatiques et pratiques religieuses variées (islam, christianisme, religions traditionnelles), la vie communautaire est rythmée par un fort attachement au patrimoine immatériel. Le vivre-ensemble y est renforcé par des alliances traditionnelles interethniques et des mécanismes communautaires de résolution des conflits, souvent complémentaires aux institutions étatiques. Cette dynamique de cohésion sociale constitue un levier précieux dans un contexte où les tensions liées à la pression foncière ou à la transhumance peuvent émerger.
En somme, Dérassi illustre à la fois la complexité et le potentiel du monde rural béninois. Si les défis à relever sont nombreux, les dynamiques locales, portées par une jeunesse active et des acteurs de terrain engagés, laissent entrevoir un avenir en construction. Pour peu que les investissements publics et les politiques de développement soient coordonnés et suivis, Dérassi pourrait devenir un modèle de territoire rural en transition, conciliant traditions et modernité.